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Thèmes :
Journées d’été
Les Verts

13 septembre 2005

"2006 : refonder les Verts, clarifier à gauche" par Marie-Hélène Aubert.

Contribution aux débats des journées d’été des Verts 2005.

Alors que la droite au gouvernement poursuit son oeuvre destructrice et gesticule , que le débat et l’affrontement font rage au Parti socialiste, pour des raisons de fond et pas seulement d’ambitions personnelles , que la gauche du NON au TCE s’organise et passe à l’offensive en vue des échéances 2007 , Les Verts paradoxalement se cramponnent à la fameuse synthèse de Reims, qui pourtant a volé en éclats dès la campagne référendaire sur le projet de Constitution européenne, révélant une fois de plus les divergences importantes d’orientation politique qui traversent notre parti depuis 2002.

La tentation est grande en effet , pour la gauche et Les Verts (et surtout pour les candidats aux présidentielles !) qui craignent que l’affichage de divisions conduisent inévitablement à la défaite en 2007, de proclamer la réconciliation et de lancer des appels vibrants à l’unité, en escamotant un débat pourtant indispensable sur la définition d’une démarche écologiste, d’une politique de gauche, dignes des défis du 21ième siècle.

Je pense au contraire que si nous ne faisons pas ce travail de clarification salutaire, que si une coalition alternative à la droite actuelle n’est pas capable de définir un projet innovant, ses priorités et ses méthodes, nous nous installerons dans l’échec durable , et laisserons le champ libre dangereusement aux démagogues de tous bords.

Il y a urgence maintenant car après le 21 avril 2002, et la cinglante défaite de la gauche plurielle, après le 29 mai 2005, et le coup d’arrêt à la construction d’une Europe politique, toute la classe politique, et la gauche en particulier, parce que profondément divisée, ne peut que s’interroger sur ses modes de fonctionnement, ses projets, sa façon de reconquérir une opinion de plus en plus défiante. Les nouvelles du monde , à travers des médias qui privilégient quotidiennement les catastrophes et le sensationnel , ne peuvent par ailleurs qu’aggraver un sentiment d’inquiétude, d’insécurité, mais aussi d’impuissance, qui s’installe au coeur de nos sociétés . Fatalistes, écoeurés ou révoltés, devant les malheurs écologiques et sociaux qui tourmentent notre pays et la planète, le risque est grand de voir les citoyens se tourner vers des hommes d’ordre et des politiques sécuritaires à courte vue , vers des populismes de gauche comme de droite, qui prétendent détenir des solutions miracles aux problèmes les plus saillants de l’emploi et de la sécurité, y compris sociale, dont les solutions s’inscrivent pourtant dans le cadre de politiques globales à plus long terme .

C’est bien ce qui pourrait se passer en France, où les thèses à poigne de Nicolas Sarkozy , qui inondent les écrans en permanence par un véritable bourrage de crâne cathodique , et celles de plus en plus banalisées du Front National , d’une part , et la virulence de la révolte (dont elle ne détient pas le monopole comme elle voudrait le faire croire) de la gauche dite radicale ou révolutionnaire d’autre part , ont clairement le vent en poupe . Leur façon simple (voire simpliste) et percutante de répondre à des questions complexes et de désigner l’ennemi , séduit en effet une opinion plus encline à soutenir ceux qui donnent le sentiment énergique de savoir ce qu’ils veulent , ce qui a tant manqué à la gauche dite de gouvernement … et aux Verts également. Les Verts ont ainsi été bien bousculés dans cette période 2002-2005. Partie prenante de l’échec du gouvernement Jospin, dont ils n’ont jamais vraiment tiré le bilan, en positif comme en négatif, puis tiraillés par une tentation récurrente de constituer un pôle à gauche du parti socialiste ( tout en gardant les bénéfices électoraux de leur alliance avec celui-ci !) , divisés sur la construction européenne, paralysés par un mode de fonctionnement abscons et inadapté, ils ont finalement opté au dernier congrès de Reims pour une synthèse hélas de façade , qui a eu sans doute le mérite de faire taire les cris, mais le gros défaut d’enterrer les nécessaires débats à mener.

Ces questions ont vite ressurgi avec acuité au moment du referendum sur le Traité constitutionnel européen. Qu’est-ce qu’être libéral ou anti-libéral ? Réformiste ou radical ? Laïc ? Qu’est-ce qu’un service public ? Quel rôle pour l’Etat ? L’Europe « carcan » ou « espoir » ? Le développement durable, pourquoi et comment ? Les Verts de fait n’ont pas su répondre clairement à ces grandes interrogations et ont contribué à la confusion ambiante. Leur lisibilité et leur crédibilité s’en sont trouvées une fois de plus amoindries. Et la trop rapide réconciliation proclamée n’a pas permis d’analyser plus au fond une divergence pourtant essentielle sur l’avenir de l’Union européenne. De plus, où sont aujourd’hui les fameux plans B, les sursauts populaires qui devaient refaire l’Europe, promis par les tenants du NON ? Pourquoi devrait-on taire les conséquences d’une campagne qui a reposé en partie sur une imposture , même si les leçons du NON doivent évidemment être tirées ?

Il est grand temps à présent d’ouvrir un débat franc et sain sur l’avenir de l’écologie politique , sans tabous ni faux-fuyants, et de choisir enfin une orientation claire pour la période à venir et en perspective des échéances 2007, clarification sans laquelle une victoire de la gauche et des Verts serait largement improbable et illusoire . Il est temps d’initier un véritable processus de refondation des Verts qui redonne à notre parti une grande ambition et un mode de fonctionnement à la hauteur de la tâche.

Le travail sur le projet, éternel rocher de Sisyphe que Les Verts remontent et laissent descendre depuis des années, n’est pas une réponse suffisante aux défis qui sont devant nous. Qui est capable aujourd’hui de faire une synthèse des livres des Verts successifs, du programme des présidentielles de 95 et 2002, des législatives de 1997 et 2002, des européennes de 99 et 2004 ? Qui a une idée claire des positions des Verts sur la laïcité, sur les questions de santé et d’éducation, sur la 6e République à construire en France, pour ne citer que quelques exemples ? Non pas qu’aucun texte n’ait été écrit ou voté sur ces sujets ces dernières années, mais ces votes n’ont pas toujours de cohérence et ces questions ont fait souvent l’objet de prises de position cacophoniques de la part des voix les plus entendues (écoutées ?) de notre parti. Le cas récent de la TIPP flottante, votée en AG dans le programme des Verts, et dénoncée par les porte-parole actuels du parti, en est une nouvelle illustration. Plutôt que de s’épuiser une fois de plus à construire une usine à gaz de commissions, groupes de travail et comités spéciaux, de brasser des milliers de mots et de virgules, de refaire sans cesse le catalogue vert, sans que se dégage la moindre direction, ne ferions-nous pas mieux de déterminer des priorités essentielles à mettre en oeuvre dans les années qui viennent, au cas où nous participerions de nouveau à une coalition de gauche victorieuse ?

On peut d’ores et déjà évoquer des questions essentielles à nos yeux : réorienter l’économie vers le développement durable (et d’abord dans les secteurs de l’énergie, des transports, des échanges et du commerce, de l’agriculture), en affrontant la crise pétrolière majeure qui s’annonce et les bouleversements qu’elle implique , repenser et investir massivement dans la santé et l’éducation, reprendre avec force la construction de l’Europe politique ( étape indispensable vers une Europe du développement durable) , réformer la politique étrangère et de coopération, mener les chantiers transversaux de la réforme des institutions de la Ve République et de la fiscalité.

De même, malgré les proclamations lénifiantes d’accord à 95% chez Les Verts, destinées à rassurer une opinion pour le moins perplexe devant nos valses-hésitations , les divergences sont évidentes entre les tenants d’un partenariat privilégié avec une gauche réformiste, social-démocrate ( en effet à rénover !), et ceux d’une alliance des Verts avec une gauche radicale, associative et syndicale, plus « mouvementiste ». Pour contourner l’obstacle et éviter les clarifications , Les Verts se proclament à présent « passerelle » entre la gauche réformiste et la gauche radicale, posture avantageuse (peu crédible en vérité) car centrale, mais qui ne résout rien au fond.

Ces divergences tiennent en fait à ce qu’on entend par écologie politique.Une écologie au paradigme propre, innovante et créative , autogestionnaire et décentralisatrice, alliant universalité des droits humains et multiplicité des pratiques et des cultures, faisant appel aussi bien à la solidarité qu’à la responsabilité, individuelle et collective, ou une écologie davantage intégrée dans les concepts plus classiques d’une gauche très attachée au rôle de l’Etat-Providence centralisateur et égalitaire, où l’environnement est une catégorie parmi d’autres.

La première fait davantage confiance à la prise de conscience, à l’initiative , et à l’action de collectifs locaux et globaux , à l’ouverture à l’Europe et au monde, la seconde à la capacité de l’Etat-nation républicain à mettre en oeuvre avec force (de lois notamment) égalité et solidarité, et à protéger des menaces extérieures.

Ce débat très vif aujourd’ hui au sein de la gauche (première, deuxième…troisième ?) , auquel nous ne pouvons rester indifférents et qui traverse Les Verts aussi, présente néanmoins le gros inconvénient d’occulter la spécificité et le caractère profondément innovant du projet écologiste, dont les fondements interrogent tout le monde dans la société . Quelles que soient les forces politiques au pouvoir en 2007, il faudra bien qu’elles se confrontent en effet aux limites physiques, sociales, du modèle de développement dominant aujourd’hui, marqué par les thèses du libéralisme économique, à l’influence croissante dans le monde des religions sur les sociétés et les pouvoirs , au vieillissement de la population dans nos pays, à l’interdépendance croissante des différents échelons de décison (du local au global) . Et manifestement les recettes ou les postures traditionnelles de la droite comme de la gauche en France ne sont plus ni opérationnelles ni convaincantes.

Le problème n’est donc pas de savoir si on veut « accompagner » le libéralisme ou transformer la société, comme le répète de façon fallacieuse une gauche dite radicale à l’égard de prétendus « socio-traîtres », gauche qui, si elle arrivait au pouvoir, devrait bien pourtant elle aussi partir des réalités telles qu’elles sont, à moins de prôner la rupture violente et la « table rase » sur le passé !

La difficulté est plutôt d’oser proposer un autre sens (direction et signification) en termes de développement, et d’assumer des choix politiques très concrets qui aillent au-delà des clivages droite/gauche habituels, au-delà de la contestation nécessaire des politiques délétères menées dans la plus grande confusion , grâce à de multiples artifices de communication, par la droite actuellement au gouvernement . Les Verts devraient être porteurs de ce bouleversement salutaire des repères politiques ( repenser le combat binaire entre la gauche et la droite, telles que les avaient définies le 19ième siècle pour le refonder sur des concepts modernes écologistes, dépasser la confrontation entre la Nation et le reste du monde) , plutôt que de se laisser aller à la facilité des concepts dépassés d’une gauche soit trop gestionnaire soit trop rhétorique, et à des pratiques politiques qui ont transformé les partis en machines à distribuer les investitures et les mandats.

La difficulté enfin est de montrer que l’alternative à la droite actuellement au pouvoir ou à une gauche trop molle (« en caoutchouc » ?) ne réside pas dans les concepts , même revisités et mis au goût du jour , du marxisme-léninisme ou du troskysme , alliés pour la circonstance à un pilier simplement relooké de feu la mitterrandie .

Pourtant, que des Verts prêtent main forte à cette entreprise ne fait même pas l’objet de discussion en notre sein ! Alors que la radicalité, dans le sens de volonté et de courage politique , peut être incarnée bien différemment que par cette gauche-là. Cela devrait être justement la grande ambition de l’écologie politique.

La politique, la démocratie, sont profondément perturbées, mises en cause même, par les impasses et les violences auxquelles mène le modèle de croissance économique actuel. Les Verts, et plus généralement les écologistes, ont alerté depuis longtemps sur les risques encourus par l’humanité, par nos sociétés , à poursuivre cette fuite en avant dans la surconsommation et une techno-science non maîtrisée, et à laisser se creuser le fossé Nord/Sud .

Malheureusement, ils n’en ont pas tiré de bénéfice politique, malgré le travail remarquable mais peu connu de leurs élus et de leurs militants dans bien des domaines. Le vote Vert reste encore très minoritaire , même s’il est sorti de la marginalité.

Le risque est grand alors de voir le parti des Verts s’étioler puis disparaître, par le découragement et la défection de militants et d’élus soit fatigués du peu de résultat politique concret, soit exaspérés par des pratiques internes usantes, paralysantes, et apparemment irréformables, ou encore se fondre dans un ensemble où l’écologie politique ne serait plus le fondement mais une composante parmi d’autres . Pourtant, au regard des événements qui secouent le monde, l’écologie politique, Les Verts, devraient s’imposer avec force dans le débat public . Ce n’est hélas pas le cas.

Le calme d’ailleurs tout relatif des Verts à l’heure actuelle ne constitue pas un but en soi et ne doit pas servir d’étouffoir, de chloroforme, à des débats essentiels concernant la définition de l’écologie politique , du rôle des Verts, et de l’action politique plus globalement.

Ces débats -là sont malheureusement absents de ces journées d’été 2005 , au profit de tables rondes et ateliers thématiques certes fort intéressants mais qui ne renouvellent guère notre « fond de commerce » habituel.

Pour bien ménager la chèvre et le chou, les plénières devaient même comporter à part égale des partisans du OUI et du NON au TCE ! Façon tout de même bien naïve de réaliser la synthèse et de régler le différend sur l’Europe …

Nous ne nous résignons pas à ce statu-quo stérile , sans conviction ni direction, qui règne au sein des Verts aujourd’hui.

Les partisans Verts du NON au TCE s’expriment, s’organisent, rencontrent les autres représentants de la gauche du NON (dans tous les sens du terme !) , et nul doute qu’ils suivent avec attention les débats internes au Parti socialiste. C’est leur droit.

Rien ne sert d’ignorer cette orientation d’une bonne partie des Verts, en se réfugiant derrière le voile bien mince de la synthèse de Reims.

Il nous faut au contraire assumer pleinement un choix politique différent pour Les Verts, l’approfondir, le mettre au jour et à jour, le faire vivre, et le soumettre au vote des adhérents lors du congrès des Verts 2006 , qui pourrait être avancé.

Cette démarche pourrait être par ailleurs le prélude à l’émergence de cette nouvelle gauche verte attendue par beaucoup, à travers un projet écologiste et des alliances clarifiés, après un effort considérable d’analyse, d’imagination, d’innovation, que nécessitent un monde, une société, en plein bouleversement.

Gouverner, c’est prévoir, et décider, c’est choisir , démocratiquement et dans la clarté. Ensuite de ces choix définis et assumés viendra l’heure du rassemblement et de la mobilisation.

Marie-Hélène AUBERT, députée européenne.


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